LA SÉANCE


une création de


MégaSuperThéâtre


mise en scène


Théodore Oliver






© Dyan Piaser

Vu à la Forêt Électrique | Théâtre Sorano (Toulouse) - 7 octobre 2023

                                    

“Un cirque trépasse”



Du Beau Monde (Amard, Fortin, Gauchet, Ripoche) au Cheval de la vie (Lou Chrétien Février), les cérémonies vouées à l’art mort et survivant du théâtre bruissent dans le jeune paysage créatif.

La Séance de MégaSuperThéâtre, nichée dans le cinéma alternatif de la Forêt électrique, est elle aussi un rituel à petits numéros, qui sont autant de tentatives d’épuisement que de protocoles de revitalisation du grand fétiche critique de la postmodernité qu’est le spectacle. Après une fausse piste dystopique qui abuse ironiquement des effets orageux, la séance est amorcée par un prologue qui, comme celui de La Fabrique des idoles, coordonne un geste qui s’avère ensuite indompté. L’inflation spectaculaire du spectacle : voilà le paradigme debordien que bêchent alors le discours choral des quatre interprètes. Sous l’égide de ce modèle critique que le Méga Super Théâtre prend autant à la lettre qu’au figuré, la dramaturgie toute en rebonds fait se répondre des séquences où la piste étoilée (clownerie, ventriloquie, funambulisme…) vient cogner contre le réel, avec d’autres actes où c’est le spectacle social (dégustation en pleine conscience de cacahuètes, yogas du rire…) qui découvre son lot de circasserie.

Le metteur en scène Théodore Oliver révèle de nouveau sa capacité - rare dans les dramaturgies fragmentaires - à rendre ces rebonds toujours organiques et à façonner une esthétique dans laquelle, malgré le vernis choisi du spectaculaire, rien n’est jamais factice (la vraisemblance des accessoires de cirque inusités en est déjà le signe). Certaines séquences - celles qui durent et parviennent à une bascule défigurante (comme la dérive jokerienne d’un clown triste) - réussissent performativement à faire clignoter le spectaculaire, c’est-à-dire à le destituer et à en raviver les braises d’un même geste. D’autres - notamment les vignettes attendues de l’artificialité contemporaine (tuto maquillage) - semblent plus régulées par leurs idées et leurs discours pour atteindre cette vitalité. L’apparition aléatoire du présent et de l’intériorité des interprètes (comme celle de Chloé Sarrat, dans un monologue vibrant, pour le coup anti-spectaculaire) peut elle aussi questionner. Car si La Séance s’arrime à l’imaginaire du cirque, elle ne semble pas toujours suffisamment saluer le théâtre qui est son médium - lieu naturel de résistance au capitalisme des images, zone des mystères préservés, levier de désenvoutement par excellence. Le cirque lui-même, espace supposé de l’exploit et de l’émerveillement, mais aussi refuge des peurs primaires et d’un imaginaire enfantin qui oublie les paillettes, pourrait quant à lui apparaître parfois comme une imagerie plus ambivalente. Malgré ces impensés dramaturgiques, ce cirque mazouté l’emporte par une recherche sans concession qui mérite à elle seule la séance.



Pierre Lesquelen, 26 octobre 2023.
    

Distribution 

Une création de MégaSuperThéâtre

Mise en scène Théodore Oliver

Interprétation Quentin Quignon, Etienne Rey Robert, Chloé Sarrat et Fanny Violeau

Regard dramaturgique Yann Basset 

Scénographie Thomas Salabert

Modélisation 3D Émile Lefebvre

Costumes Coline Galeazzi

Création de totems Louis Ponsolle

Lumière et régie Édith Richard

Regard sonore Clarice Boyriven et Clément Hubert

Collaboration artistique Maéva Meunier et Guillaume Miramond 




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